Les réglementations sur la concurrence et l’antitrust suscitent une attention croissante en Haïti, où le marché reste marqué par des pratiques monopolistiques et une faible surveillance étatique. Les autorités, soutenues par des institutions internationales, cherchent à instaurer un cadre légal plus robuste afin de garantir une économie plus équitable et compétitive.

Le cadre actuel de la concurrence en Haïti
En Haïti, la législation sur la concurrence demeure fragmentaire. Contrairement à d’autres pays de la région, le pays ne dispose pas encore d’une loi antitrust complète. Certains articles du Code de commerce encadrent la transparence et la libre circulation des biens, mais ils restent insuffisants pour lutter contre les cartels ou les abus de position dominante.
Selon des rapports de la Banque mondiale, l’absence d’une Autorité de la concurrence indépendante prive l’État des moyens de surveiller efficacement les secteurs stratégiques, comme l’énergie, les télécommunications ou l’importation de biens essentiels.
Pourquoi un cadre antitrust est crucial pour le marché haïtien
Risques liés à l’absence de régulation
L’absence de régulation antitrust favorise la concentration économique entre quelques acteurs dominants. Cela entraîne :
- Une augmentation artificielle des prix, notamment dans les produits alimentaires et pharmaceutiques.
- Une limitation de l’accès des petites et moyennes entreprises (PME) aux marchés.
- Une fragilisation des consommateurs, contraints à subir des conditions de marché déséquilibrées.
L’importance pour les investisseurs
Un cadre clair et fiable renforcerait l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers. Les entreprises internationales exigent des garanties de concurrence loyale avant de s’engager sur de nouveaux marchés.
Efforts en cours pour encadrer la concurrence
Le gouvernement haïtien, avec l’appui de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et d’organismes comme la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), explore depuis plusieurs années des projets de réforme.
Un avant-projet de loi sur la concurrence a été évoqué à plusieurs reprises au Parlement, sans toutefois être adopté en raison d’instabilités politiques.
Des experts, tels que Jean Baden Dubois, ancien gouverneur de la Banque de la République d’Haïti (BRH), ont souligné la nécessité d’« un cadre légal qui protège le consommateur et favorise l’innovation au lieu de défendre les privilèges ».
Comparaison régionale et leçons pour Haïti
Plusieurs pays voisins, dont la République dominicaine et la Jamaïque, disposent déjà d’autorités de la concurrence actives. Ces organismes sanctionnent les pratiques anticoncurrentielles et imposent des normes transparentes aux entreprises.
Le contraste met en évidence le retard d’Haïti, mais aussi les opportunités de tirer parti des expériences régionales pour adapter un modèle fonctionnel au contexte national.
Défis et perspectives
Le principal défi reste politique. L’instabilité institutionnelle freine l’adoption de réformes structurelles. De plus, certains groupes d’intérêts, bénéficiant d’un quasi-monopole sur des secteurs clés, résistent à toute tentative de régulation.
Néanmoins, plusieurs économistes estiment que la pression des consommateurs, combinée à l’appui des bailleurs internationaux, pourrait accélérer l’adoption d’une législation antitrust moderne dans les prochaines années.
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Dernier développement
À ce jour, aucun calendrier officiel n’a été communiqué concernant l’adoption d’une loi de concurrence en Haïti. Toutefois, les discussions en cours laissent entrevoir une volonté politique de s’aligner sur les standards régionaux et internationaux.
Comme l’a résumé un expert en droit économique basé à Port-au-Prince : « Haïti n’a pas le choix. Une économie sans régulation de la concurrence est condamnée à rester fermée et vulnérable.